P. von Rohden, RE, 1/1, 1893, col. 583 n° 133 s. v. Aemilius ; A. Stein, PIR², 1933, p. 68, A 399 ; Devijver 1976, p. 85-86, A 8 ; Demougin 1992, p. 445, n° 535.
Front., Strat., 4, 1, 28 : Domitius Corbulo in Armenia Aemilio Rufo praefecto equitum, quia hostibus cesserat et parum instructam armis alam habebat, uestimenta per lictorem scidit eidemque ut erat foedato habitu perstare in principiis, donec emitteretur, imperauit.
Domitius Corbulon, en Arménie, punit le préfet de cavalerie Aemilius Rufus, parce qu’il avait lâché pied devant l’ennemi et avait mal équipé en armes les troupes de son aile, en lui faisant déchirer les vêtements par un licteur et en lui ordonnant de rester debout devant le quartier général dans cet état déshonorant, jusqu’à ce qu’on lui donnât l’autorisation de s’en aller (trad. P. Laederich, Economica).
La difficulté de la campagne contre les Parthes pour la reconquête de l’Arménie, en 58-59[1], avait poussé Cn. Domitius Corbulon, qui la dirigeait, à instaurer une disciplina stricte dans son armée. Non seulement il avait préparé durement ses hommes avant l’expédition[2], mais au cours de celle-ci il infligea à plusieurs reprises des punitions humiliantes pour maintenir la discipline[3]. Aemilius Rufus, un préfet de cavalerie inconnu par ailleurs en fit les frais. Comme il avait fui lors d’un combat, Corbulon l’exposa au centre du camp après lui avoir fait déchirer ses vêtements par un licteur. Le déroulement des faits donne l’impression que Corbulon renonça au dernier moment à faire flageller publiquement[4] un personnage de rang équestre, si l’on en juge par son grade[5], et se contenta d’une exposition humiliante. Celle-ci était une punition déjà bien connue à l’époque et constituait la forme la plus pure de stigmatisation. Elle offrait aux regards du reste de l’armée le soldat puni dans une position déshonorante, ici par la nudité symbolisant la qualité de vaincu et d’esclave. Flétrissure pour le fautif, elle était aussi un avertissement pour le spectateur[6]. Tacite nous indique que la sanction dura donec emitteretur. Cela n’implique pas qu’elle ne dépassa pas la journée, nous avons l’exemple de C. Titius qui fut ainsi exposé ignominieusement jusqu’à la fin de son service après sa défaite face aux esclaves révoltés en 133[7]. La sanction put donc se prolonger pendant plusieurs jours voire plusieurs semaines, plus pour intimider la troupe que pour châtier Aemilius. Cet épisode mit sûrement un terme à la carrière équestre d’Aemilius Rufus dont on n’entend plus parler par la suite.
[1] Heil 1997, p. 86-100.
[2] Tac., Ann., 13, 35.
[3] Cf. notices n° 96 et 98.
[4] Cordier 2005, p. 169 rappelle que ce déshabillage dégradant était un préalable nécessaire au châtiment corporel.
[5] Sur la préfecture d’aile voir Demougin 1988, p. 336-344.
[6] Cf. Bur 2018, chapitre 1.3.1.
[7] Cf. notice n° 89.
Bur 2018 : Bur C., La Citoyenneté dégradée : une histoire de l’infamie à Rome (312 avant J.-C. – 96 après J.-C.), Rome, 2018.
Cordier 2005 : Cordier P., Nudités romaines. Un problème d’histoire et d’anthropologie, Paris, 2005.
Demougin 1988 : Demougin S., L’Ordre équestre chez les Julio-Claudiens, Rome, 1988.
Demougin 1992 : Demougin S., Prosopographie des chevaliers romains julio-claudiens, Rome, 1992.
Heil 1997 : Heil M., Die orientalische Außenpolitik des Kaisers Nero, 1997.