F. Münzer, RE, 3/2, 1899, col. 2589, n° 4 s. v. Cispius ; K.-L. Elvers, Neue Pauly, 2, 1997, col. 1222 s. v. Cispius ; Crawford 1984, p. 170-172, n° 57 ; Alexander 1990, p. 136, n° 279 ; DPRR n° CISP2383.
Cic., Planc., 75-77 : « Quo usque ista dicis ? Nihil in Cispio profecisti ; obsoletae iam sunt preces tuae ». De Cispio mihi igitur obicies, quem ego de me bene meritum, quia te teste cognoram, te eodem auctore defendi ? Et ei dices « quo usque ? » quem negas, quod pro Cispio contenderim, impetrare potuisse ? […] Ei quidem qui pro uno laborarit <et> id ipsum non obtinuerit dici « quo usque ? » inridentis magis est quam reprehendentis ; […] Et mihi lacrimulam Cispiani iudici obiectas. […] Vide quam me uerbi tui paeniteat. Non modo lacrimulam sed multas lacrimas et fletum cum singultu uidere potuisti. An ego, qui meorum lacrimis me absente commotus simultates, quas mecum habebat, deposuisset meaeque salutis non modo non oppugnator, ut inimici mei putarant, sed etiam defensor fuisset, huius in periculo non significarem dolorem meum ?
« Jusques à quand tiendras-tu ce langage ? Tu n’as rien obtenu dans l’affaire de Cispius ; tes prières, maintenant, sont d’une autre saison ! » Ainsi, tu m’opposeras l’affaire de Cispius, alors que j’ai su ce qu’il avait fait pour moi par ton propre témoignage et que c’est pour cela, à ta propre demande, que je l’ai défendu ? Et tu me diras « jusques à quand ? », à moi dont tu affirmes en même temps que je n’ai pu obtenir ce que je tâchais d’obtenir pour Cispius ? […] Mais, à quelqu’un qui n’a lutté que pour un seul accusé et qui n’a pas eu gain de cause, dire « jusques à quand ? » c’est se moquer plutôt qu’adresser un reproche […] Et tu me reproches « ma petite larme » dans le procès de Cispius […] Comprends à quel point je regrette ce mot que tu as employé. Ce n’est pas une « petite larme », ce sont beaucoup de larmes, des pleurs accompagnés de sanglots que tu aurais pu voir. Ou bien fallait-il que cet homme, qui, touché en mon absence, par les larmes des miens, avait oublié les différends qu’il avait avec moi et s’était révélé non pas, comme l’avaient pensé mes ennemis, hostile à mon salut, mais s’était fait mon champion, fallait-il que, lorsqu’il était en péril, je ne manifeste pas la part que je prenais à sa peine ? (Trad. P. Grimal)
Schol. Bob., p. 165 St. : dicente Laterense : « […] Et pro Cispio causam dicente sic rogasti et precibus tuis ambitum paene mouisti ! »
Laterensis disant : « […] Et, en plaidant pour Cispius, tu as demandé ainsi et par tes prières tu as presque écarté la brigue ! »
M. Cispius, qui porte un nom peu représenté dans nos sources, fut tribun de la plèbe en 57[1]. À cette occasion, il participa activement au rappel d’exil de Cicéron[2], bien qu’il y eût auparavant une brouille entre eux[3]. Un passage du Pro Plancio, prononcé en 54, nous apprend qu’entre la fin de son tribunat en décembre 57 et ce discours il fut accusé et condamné malgré la défense de Cicéron. W. Drumann, P. Groebe et F. Münzer plaçaient le procès en 56. E. S. Gruen, suivi par J. W. Crawford et J.-M. David[4], réfuta les datations plus basses de L. Lange et M. Gelzer[5], qui le situaient plutôt vers 54, en s’appuyant sur les références de Cicéron à son exil devenu moins polémique à cette époque. On déduit généralement du passage de la Scholia Bobiensa qu’il s’agissait d’une accusation de ambitu[6], liée sans doute à son élection au tribunat en raison de la date. La lex Tullia de ambitu de 63, d’après laquelle Cispius fut condamné, prévoyait un exil de l’Italie pour dix ans ainsi que l’exclusion du Sénat et l’inéligibilité à vie[7]. À son retour, il restait donc dans une situation d’infamie. Or une inscription mentionne un M. Cispius L. f. pr(aetor)[8]. Comme le soulignait T. Mommsen, il était impossible d’identifier ce personnage à notre Cispius, puisqu’il était toujours inéligible à moins de supposer une complète réhabilitation. Celle-ci pouvait être l’œuvre de César dont nous savons qu’il rappela nombre d’exilés en 49 parce qu’il avait besoin de s’attirer des partisans. L’hypothèse selon laquelle Cispius poursuivit sa carrière publique grâce au rappel d’exil et à la restitutio in integrum prononcée par César au début de la guerre civile est aujourd’hui assez largement partagée[9]. Nous ne lui connaissons aucun descendant.
[1] Niccolini 1934, p. 302 et MRR, 2, p. 202.
[2] Cic., Sest., 76.
[3] Cic., Sen., 21 et Planc., 76.
[4] Drumann et Groebe 1919, p. 686 ; F. Münzer, RE, 3/2, 1899, col. 2589, n° 4 s. v. Cispius ; Gruen 1974, p. 304 en particulier n. 162 ; Crawford 1984, p. 170 ; David 1992, p. 804 ; Alexander 1990, p. 136, n° 279 ; K.-L. Elvers, Neue Pauly, 2, 1997, col. 1222 s. v. Cispius.
[5] Lange 1876, p. 347-348 ; Gelzer 1969, p. 195.
[6] Drumann et Groebe 1919, loc. cit. ; F. Münzer, loc. cit. ; Niccolini 1934, loc. cit. ; Gruen, loc. cit. ; Crawford 1984, loc. cit. ; David 1992, loc. cit. ; Alexander 1990, loc. cit. ; K.-L. Elvers, loc. cit. Contra Zumpt 1871, p. 558 n. 2 et Lange 1876, loc. cit. qui considèrent qu’il est impossible de conclure du texte de la scolie à une accusation de ambitu.
[7] Cf. Bur 2018, chapitre 11.5.
[8] CIL, 1², 819 = ILLRP, 383.
[9] F. Münzer, loc. cit. ; MRR, 2, p. 463 ; K.-L. Elvers, loc. cit.
Alexander 1990 : Alexander M. C., Trials in the late Roman Republic, 149 BC to 50 BC, Toronto, 1990.
Bur 2018 : Bur C., La Citoyenneté dégradée : une histoire de l’infamie à Rome (312 avant J.-C. – 96 après J.-C.), Rome, 2018.
Crawford 1984 : Crawford J. W., M. Tullius Cicero : The Lost and Unpublished Orations, Göttingen, 1984.
David 1992 : David J.-M., Le Patronat judiciaire au dernier siècle de la République romaine, Rome, 1992.
Drumann et Groebe 1919 : Drumann W. et Groebe P., Geschichte Roms, 5, Leipzig, 1919².
Gelzer 1969 : Gelzer M., Cicero, ein biographischer Versuch, Weisbaden, 1969².
Gruen 1974 : Gruen E. S., The Last Generation of the Roman Republic, Berkeley, 1974.
Lange 1876 : Lange L., Römische Alterthumer, 3, Berlin, 1876².
Niccolini 1934 : Niccolini G., I Fasti dei tribuni della plebe, Milan, 1934.
Zumpt 1871 : Zumpt A. W., Der Criminalprocess der römischen Republik, Leipzig, 1871.