Infames Romani

M. ? Herennius M. f. ? Picens ? [3]

Numéro
115
Identité
Catégorie
Punitions militaires infamantes
Sous catégorie
Missio ignominiosa
Date de l'épisode
14
Références prosopographiques

F. Münzer, RE, 8/1, 1912, col. 662, n° 3 s. v. Herennius.

Attention ! L'épisode est daté simplement du règne d'Auguste.

Source
Source

Quint., Inst. Or., 6, 3, 64 : Neque enim eodem modo dixit Augustus praefecto quem < cum > ignominia mittebat, subinde interponenti precibus : « quid respondebo patri meo ? » « dic me tibi displicuisse ».
C’est ainsi, en effet, qu’Auguste, qui avait destitué un officier par mesure infamante, se vit supplier par lui en ces termes : « Que répondrai-je à mon père ? » - « Dis-lui que je t’ai déplu »[1] (trad. J. Cousin, CUF).

Macr., Sat., 2, 4, 6 : Vrbanitas eiusdem innotuit circa Herennium deditum uitiis iuuenem. Quem cum castris excedere iussisset, et ille supplex hac deprecatione uteretur : « quo modo ad patrias sedes reuertar ? Quid patri meo dicam ? » respondit, « dic me tibi displicuisse ».
Son esprit [d’Auguste] s’illustra aussi sur le compte d’Herennius, un jeune homme adonné aux vices. Il lui avait ordonné de quitter le camp et celui-ci le suppliait de revenir sur sa décision en lui adressant ces mots : « Comment retournerais-je au foyer paternel ? Que dirai-je à mon père ? », « Dis que je t’ai déplu », répondit-il (trad. C. Guittard, La Roue à Livres).




[1] Le passage est recensé parmi les fragments d’Auguste cf. Malcovati 1945 [1921], dicta n° 10.

Notice
Notice

Herennius apparaît dans deux passages de Quintilien et Macrobe rapportant un bon mot d’Auguste dont il est la victime[1]. F. Münzer, dans sa notice de la Realencyclopädie, a suggéré de l’identifier à M. Herennius Picens[2], consul suffect en 1 après J.-C. et proconsul d’Asie. Les deux textes, bien que brefs, offrent néanmoins quelques informations. Quintilien présente Herennius comme un praefectus et Macrobe comme un iuuenis, ce que confirment ses craintes sur la réaction de son père. Nous pouvons en déduire qu’Herennius appartenait à un ordre privilégié, sans doute l’ordre équestre, puisque malgré son jeune âge il exerçait déjà un commandement militaire, vraisemblablement durant son service militaire.


Pendant une campagne, le jeune homme fut renvoyé ignominieusement de l’armée par Auguste qui la commandait[3]. Le motif de la punition est précisé par Macrobe et il n’y a aucune raison d’en douter puisque cela éclaire le bon mot d’Auguste. Herennius serait deditus uitiis, c’est-à-dire qu’il menait au camp une vie de plaisirs incompatible avec ses devoirs militaires et son rang. Herennius fut convoqué par son général, Auguste, qui soit avait été alerté sur son comportement soit l’avait constaté. La sentence fut prononcée malgré ses prières.


Le contexte de l’épisode s’accorde mieux à une campagne sous le règne d’Auguste, alors qu’il prônait le retour à l’ordre moral, que durant les guerres civiles[4]. Par conséquent, il nous paraît difficile de supposer que notre Herennius puisse être M. Herennius Picens. De plus, l’humiliation subie à l’armée fut grave et mit très certainement un terme à la carrière du jeune homme : un consulat suffect en 1 après J.-C. serait surprenant. Si les deux personnages étaient apparentés, nous pensons que Picens serait plutôt le père de notre personnage. La figure paternelle telle qu’elle apparaît à travers la crainte de devoir rendre compte du renvoi conviendrait à celle d’un consulaire attendant de son fils une brillante carrière, après avoir réussi à le placer comme préfet dans l’armée menée par Auguste lui-même.


En conclusion, Herennius, sans doute un jeune chevalier romain et peut-être le fils de M. Herennius Picens, consul suffect en 1 après J.-C., fut renvoyé ignominieusement de l’armée par Auguste pour sa conduite indigne au camp. Nous n’avons aucune autre information sur lui et il est fort probable que cette sanction ait mis un terme à sa carrière.




[1] Quint., Inst. Or., 6, 3, 64 et Macr., Sat., 2, 4, 6.
[2] E. Groag, RE, 8/1, 1912, col. 675-676, n° 34 s. v. Herennius ; E. Groag et A. Stein, PIR², 4/1, 1952, p.76-77, H 118.
[3] Quint., Inst. Or., 6, 34, 3 : <cum> ignominia mittebat. Sur la missio ignominiosa cf. Bur 2018, chapitre 1.3.2.
[4] Cependant le nom d’Auguste chez Quintilien ne fournit certainement aucune indication chronologique. Son propos est de rapporter un mot d’esprit du Prince, non de raconter une anecdote historique précise.
Bibliographie
Bibliographie

Bur 2018 : Bur C., La Citoyenneté dégradée : une histoire de l’infamie à Rome (312 avant J.-C. – 96 après J.-C.), Rome, 2018.


Malcovati 1945 [1921] : Malcovati H., Augusti fragmenta, Turin, 19453 [1921].


Clément Bur, Infames Romani n°115, Albi, INU Champollion, Pool Corpus, 2018, mis à jour le