Infames Romani

Porte-enseignes de Pharsale

Numéro
102
Identité
Catégorie
Punitions militaires infamantes
Sous catégorie
Dégradation statutaire
Date de l'épisode
-48
Source
Source

Caes., Civ., 3, 74, 1 : Haec habita contione, nonnullos signiferos ignominia notauit ac loco mouit.


Après ce discours, César taxa d’infamie et cassa un certain nombre de porte-enseignes (trad. P. Fabre, CUF).

Notice
Notice

Peu avant la bataille de Pharsale, au cours de l’été 48, les troupes de César connurent une double défaite non loin de Dyrrachium[1]. Pour raffermir le moral de ses hommes, César prononça ensuite un discours[2] et dégrada des porte-enseignes. Les termes utilisés par César, qui rapporte ses propres actes, loco mouit, désignent sans ambiguïté la perte du rang de signiferus. En revanche, l’expression ignominia notauit renvoie à une activité de type censorien en raison de la proximité des deux actions. César consigna le nom des hommes qui s’étaient montrés indignes de leur rang sur les registres militaires et enregistra ainsi leur humiliation et leur dégradation dans les archives romaines de manière comparable à la nota censoriale[3].


Le choix des fautifs peut paraître curieux : pourquoi ne blâmer que les porte-enseignes et non les centurions, les soldats ou les officiers ? Les signiferi servirent probablement à cette occasion de boucs-émissaires, cristallisant le ressentiment et la honte des soldats qui, comme l’affirmait César qui cherchait à minimiser l’échec subi, attendaient impatiemment de se racheter[4]. Le châtiment devait favoriser le recreare animos qu’attendait César[5]. Les porte-enseignes, qui ne commandaient pas les soldats, étaient sans doute accusés d’avoir perdu l’étendard qu’ils devaient protéger au péril de leur vie. On leur reprochait peut-être de ne pas avoir fait preuve du même courage que le héros dont César rapporte le haut-fait pour détourner l’attention de sa défaite, si tant est que ce n’est pas une pure invention[6]. Jugés seuls responsables de cette honte, ils furent cassés pour servir d’exemple au reste de la troupe, car, dans un contexte de guerre civile, une trop grande rigueur pouvait s’avérer contre-productive voire même dangereuse pour le général.






[1] Caes., Civ., 3, 62-71.


[2] Caes., Civ., 3, 73.


[3] Cf. Bur 2018, chapitre 4.5.


[4] Caes., Civ., 3, 74, 2.


[5] Caes., Civ., 3, 74, 3 : Contra ea Caesar neque satis militibus perterritis confidebat spatiumque interponendum ad recreandos animos putabat (« Mais César n’avait pas assez de confiance en des troupes encore troublées et croyait qu’il fallait laisser passer quelque temps pour refaire leur moral », trad. P. Fabre, CUF).


[6] Caes., Civ., 3, 64, 3-4.

Bibliographie
Bibliographie

Bur 2018 : Bur C., La Citoyenneté dégradée : une histoire de l’infamie à Rome (312 avant J.-C. – 96 après J.-C.), Rome, 2018.


Clément Bur, Infames Romani n°102, Albi, INU Champollion, Pool Corpus, 2018, mis à jour le